La tendresse dans l’exode avec les Petites Soeurs de Jésus à Ashti

La tendresse dans l’exode avec les Petites Soeurs de Jésus à Ashti

PORTRAIT – Les Petites Sœurs de Jésus qui vivent au cœur du camp d’Ashti au milieu des réfugiés chrétiens de la plaine de Ninive sont un havre de douceur au milieu d’un quotidien souvent pesant. Pause tendresse.

On reconnait la caravane que partagent les deux petites sœurs de Jésus dans le camp d’Ashti au soin qui y est apporté : une petite terrasse accueillante ornée de fleurs, une petite table et des chaises. Un soin assez peu commun dans ce camp où 1 200 familles vivent à l’étroit depuis deux ans déjà.

Les petites soeurs de Jésus à l'entrée de leur caravane à Ashti

Les petites soeurs de Jésus à l’entrée de leur caravane à Ashti

Partager le quotidien des plus pauvres

Leur congrégation a été fondée en 1939 par Madeleine Hutin pour les plus pauvres en Orient avec les musulmans, à la suite du bienheureux Charles de Foucauld qui se disait « Petit frère universel de Jésus ».

« Partager le quotidien des plus pauvres », telle est la vocation de petites sœurs de Jésus. Et c’est dans ce camp, auprès de ceux qui ont tout perdu, que le Seigneur les a menées. Contraintes par Daesh à quitter Mossoul en quelques heures, le 10 juin 2014, les religieuses sont arrivées au Kurdistan irakien dans leur fraternité d’Ankawa à Erbil. Les petites sœurs d’Ankawa ont alors accueilli dans leur fraternité une quarantaine de réfugiés.

La congrégation a décidé d’ouvrir une petite fraternité dans le camp après un moment de discernement – à cause du petit nombre de petites sœurs – tant les conditions de vie y sont difficiles. La chaleur, la proximité des caravanes, l’oisiveté des hommes et des adolescents, les rares perspectives d’avenir et les différences entre les familles créent des tensions difficiles à supporter pour les habitants du camp.

« L’amour est vainqueur! »

Sœur Maryam Farah, l’une des deux habitantes de cette caravane un peu particulière, a été en l’an 2000 envoyée à Mossoul où elle fait l’expérience de l’hostilité de certains musulmans vis-à-vis des chrétiens. Les attaques parfois violentes auxquelles elle est confrontée la font douter du bien-fondé de son apostolat. 

Un jour où elle partait travailler à l’hôpital – elle est employée par le gouvernement central irakien pour y distribuer les repas – un adolescent l’insulte dans la rue, sans aucune autre raison que la croix qu’elle porte sur le cœur et le voile bleu qui entoure son visage. Elle porte ses insultes dans son cœur et continue sans ciller. Quelques mois plus tard, elle frappe à la porte d’une des chambres de l’hôpital pour sa distribution. Le malade touché par sa gentillesse lui demande pardon pour les insultes qu’il avait proférées à son égard. Il s’agissait en effet du même homme et elle ne l’avait pas reconnu. « Cela m’a prouvé une fois encore que l’amour est vainqueur ! »

Une des petites soeurs vivant à Ashti

Une des petites soeurs vivant à Ashti

A cette période elle pense souvent à quitter Mossoul jusqu’à ce qu’un prêtre lui rappelle que, si elle suit Jésus qui a été persécuté et qu’elle parvient à vivre ça en paix, et si sa vocation est de rester auprès des plus pauvres à Mossoul, elle trouvera les forces pour mener à bien cette mission qui lui est confiée. Finalement, ce sera l’exil.

Une mission remplie d’attention à l’autre

Mais cette mission, les petites soeurs la poursuivent dans le camp où elles visitent les familles très régulièrement. C’est la rencontre avec les adolescents, souvent livrés à eux-mêmes, qui les motivent particulièrement. Leur oreille attentive et la proximité dont elles font preuve avec les gens leur permettent d’être informée sur tout ce qui se passe dans le camp : des belles choses comme des moins glorieuses. Elles confient par exemple qu’un jeune homme ivre frappe à leur caravane souvent la nuit depuis quelques semaines. Il leur demande de le ramener chez lui par peur de son père, alcoolique lui aussi. Deux autres jeunes garçons commencent à fumer, parce qu’ils sont laissés à eux-mêmes – elles vont les visiter fréquemment.

Leurs vies sont partagées entre le partage et la prière ; elles cherchent d’ailleurs à encourager la prière individuelle, au cœur de la vie du camp, par l’adoration hebdomadaire. 

« Ce qui nous rend joyeuses, c’est de voir les jeunes heureux. » Dans le bus vers Souleymania, où s’est déroulé le premier camp organisé pour des adolescents de la paroisse de MartSchmouni à Erbil cet été, les petites Soeurs riaient avec tous ces jeunes qui dansaient et chantaient. Pari réussi.

 

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