Alors que la Turquie a mené des frappes aériennes contre la région de Sinjar où vivent de nombreux Yézidis, Faraj Benoît Camurat, président de Fraternité en Irak, plaide pour que la zone soit sanctuarisée.
Tribune de Faraj Benoît Camurat
Durant la nuit du 24 au 25 avril 2017, l’armée de l’air turque a conduit une quinzaine de frappes sur la partie supérieure de la montagne de Sinjar. Environ cinq mille yézidis qui ont dû fuir Daech au moment de la prise de la ville de Sinjar le 4 août 2014, vivent toujours sur cette partie du Mont.
Ces bombardements menés à proximité de camps de réfugiés yézidis sont extrêmement préoccupants. Les familles qui se trouvent dans ces camps comptent dans leurs rangs des centaines de jeunes femmes toujours aux mains de Daech et elles continuent à pleurer leurs proches assassinés par les djihadistes. Il s’agit d’une population particulièrement vulnérable nécessitant un soutien humanitaire renforcé.
Nos amis sur place nous ont fait part du sentiment de peur qui envahit la population. En début d’après-midi ce 25 avril, des avions turcs ont de nouveau survolé les camps de réfugiés provoquant un mouvement de panique. Apeurées, certaines familles sont retournées se cacher dans les grottes où elles s’étaient abritées en 2014. Les Yézidis avec lesquels nous nous sommes entretenus se sentent une nouvelle fois persécutés.
De son côté, l’armée de l’air turque a déclaré cibler des militants kurde du PKK. Les frappes menées par l’armée turque ont causé la mort d’un garçon yézidi, Soufiane Jassim, âgé 14 ans, dans le village de Karsi. Cinq Peshmergas ont aussi trouvé la mort tandis que neuf autres auraient été blessés. Ce raid a par ailleurs détruit une base de la milice yézidie, YBS, qui participe actuellement à l’offensive contre Daech à Mossoul.
Ce bombardement renforce l’état d’instabilité et d’angoisse des 5 000 Yézidis qui ont choisi de rester sur leur montagne sacrée. Ces bombardements remettent en cause le double statut de sanctuaire de la montagne de Sinjar : sanctuaire humanitaire où les Yézidis ont pu se réfugier depuis 2014 et sanctuaire religieux.
Les Yézidis ont déjà trop souffert pour être maintenant les victimes de l’aviation turque et de sa chasse contre les militants du PKK. Il est nécessaire que la communauté internationale qui n’a pas su empêcher en 2014 le génocide de milliers de Yézidis mette fin à ces frappes qui fragilisent un peu plus ce peuple dans un de ses berceaux historiques.