Au sud de l’Irak, la lente disparition des Mandéens, disciples de St Jean Baptiste

Au sud de l’Irak, la lente disparition des Mandéens, disciples de St Jean Baptiste

DECOUVERTE – Les mandéens existent depuis « la nuit des temps ». Apparus dans les marais du sud de l’Irak, ils sont aujourd’hui installés également en Syrie et en Iran. Certaines communautés se sont aussi formées en Allemagne, aux Pays-Bas, en Hollande ou en Australie, en raison de la forte émigration que connaît cette minorité depuis 2003. A cette date 10 000 mandéens vivaient à Bassorah, contre environ 4 000 aujourd’hui. Fraternité en Irak les a rencontrés.

Une croyance dans la puissance de la raison

Anciens païens fin connaisseurs des étoiles, les mandéens sont devenus des disciples de Jean-Baptiste, mais ne suivent pas Jésus. Leur spiritualité repose sur l’idée que le savoir permet d’atteindre Dieu. Une croyance dans la puissance de la raison qui a donné naissance à de grands intellectuels parmi cette minorité. Ils sont aussi réputés pour leur travail de l’or, aujourd’hui quasiment disparu. Comme les chrétiens, les mandéens croient en une vie après la mort et à un jugement divin. Leur livre saint, le Botha, aurait été écrit par un ancien patriarche sous la dictée d’un ange, car, selon les mandéens, « quand les hommes n’étaient pas des pécheurs, dans le passé, ils parlaient avec les anges » nous explique Nedham Kredy, chef mandéen d’Amara, une ville à 200 km au nord de Bassorah. Dotés de leur propre alphabet, proche de l’araméen, ils ont également un symbole particulier : une croix entourée d’un vêtement blanc, représentant le corps de Jean-Baptiste, surmonté d’un rameau végétal.

Une spiritualité concentrée sur la purification du baptême 

La spiritualité des mandéens se concentre sur le rite du baptême, régulièrement renouvelé. Traditionnellement réalisé dans une rivière, il est de plus en plus célébré dans un local aménagé avec une piscine remplie de l’eau du fleuve le plus proche, comme à Bassorah. « Nous pouvons de moins en moins aller à la rivière pour des raisons de sécurité » nous explique sheikh Mazah, chef mandéen de Bassorah. Tous les dimanches, une célébration baptise ou rebaptise plusieurs personnes qui plongent trois fois dans l’eau, la boivent, puis sont « bénis » par le sheikh et reçoivent une feuille d’une plante considérée comme étant sacrée. Durant cette célébration, le baptisé remercie Dieu, demande pardon pour ses péchés et promet de ne pas pécher à nouveau.

Le clergé

« Les prêtres mandéens viennent de familles « pures » c’est-à-dire avec un corps pur et un esprit sain » nous explique Nedham Kredy, chef mandéen d’Amara. Tous ne peuvent donc pas accéder à la prêtrise. Il n’y a pas de lieu de formation semblable à un séminaire. Comme chez les chrétiens, le clergé est organisé selon une hiérarchie : le termiza (prêtre) obéit à son gin zabra (évêque), lui-même sous l’autorité du bi shema (patriarche), aujourd’hui sheikh Satar. Celui qu’on appelle le chef « de l’Irak et du monde » vit aujourd’hui en Australie. On compte entre 50 et 60 sheikhs dans le monde selon Nedham Kredy.

Une communauté en danger

Environ 4 000 Mandéens vivent à Bassorah aujourd’hui, contre 10 000 en 2003. Dans une autre grande ville du sud de l’Irak, Amara, ils ne sont plus que que 80 familles. Le chef de la communauté estime que 200 familles ont quitté Amara depuis 2003, « menacées par des musulmans fanatiques ». Comme chez les chrétiens de la région, la persécution se traduit surtout par un accès difficile aux emplois. Un élu mandéen représente cette minorité religieuse au Parlement, mais « dans cinq ou six ans, il n’y aura plus de mandéens en Irak » prédit le sheikh Nedham Kredy. Une menace d’autant plus forte qu’il est impossible de se convertir au mandéisme, et que les mariages mixtes sont interdits, sous peine d’exclusion de la communauté.

Fraternité en Irak agit auprès de toutes les minorités d’Irak. Aidez-nous à faire sortir de terre l’école multiconfessionnelle de Bassorah, ou chrétiens, musulmans et mandéens pourront aller à l’école et apprendre à vivre ensemble.

Actualité Bassorah