Soeur Amira, au service des réfugiés dans le nord de l’Irak

Soeur Amira, au service des réfugiés dans le nord de l’Irak

TEMOIGNAGE – Dans la province de Dohuk, au nord du Kurdistan irakien, une religieuse travaille sans relâche pour aider les déplacés chassés par l’Etat islamique. Les membres de Fraternité en Irak ont passé Noël avec elle. Portrait.

« Nous avons tous fui ensemble la ville de Qaraqosh dans la nuit du 7 août, et sommes venus chercher de l’aide dans la région, sans autre projet que celui de trouver refuge ici alors que nos villages étaient envahis par Daesh » explique Sœur Amira. Depuis la prise de la ville par l’”Etat islamique” et la fuite de tous ses habitants, elle s’est installée dans un village proche de Zakho, dans la province de Dohuk. Cette zone du nord de l’Irak proche de la frontière turque accueille aujourd’hui des dizaines de milliers de déplacés chassés de la plaine de Ninive et de la région de Sinjar qui vivent dans des conditions extrêmement précaires.

Du Canada à l’Irak

Elle-même originaire d’un petit village des montagnes kurdes, dans l’est de la province, cette Mère Teresa à l’énergie inépuisable et au regard pétillant a construit sa vie sur l’amour et le don de soi. Au Canada, où sa famille a émigré, elle entre d’abord chez les petites soeurs de la Charité et se consacre à l’éducation des enfants atteints de handicap. En 2009, elle décide de revenir en Irak pour agir auprès des familles pauvres de Qaraqosh. Quelques mois après son retour, elle y ouvre un centre pour l’accueil des enfants et des personnes handicapées, une démarche novatrice dans le pays. « Le matin, nous nous occupions du catéchisme et d’activités pour une centaine d’enfants, l’après-midi était occupé à rendre visite aux familles les plus démunies », raconte-t-elle.

C’est aussi à Qaraqosh qu’elle mûrit une décision importante : celle de fonder un ordre religieux. Avec l’accord de l’évêque syriaque catholique de Mossoul, Mgr Petros Mouché, elle créée l’Ordre du Très Saint Sacrement, qui sera tourné vers l’aide des plus pauvres et l’adoration eucharistique. Elle accueille bientôt deux novices pour l’accompagner dans sa mission. Depuis 2011, Fraternité en Irak avait la joie de partager leur quotidien chaque été en organisant avec les sœurs un centre aéré pour les enfants défavorisés et des cours de couture pour les femmes.

Soeur Amira sillonne les villages où se trouvent les réfugiés dans la région de Zakho – © Fraternité en Irak

Discussion avec les novices – ©Fraternité en Irak

> A lire aussi : Carnet de voyage 2011 – Fraternité en Irak à Qaraqosh

Vivre avec les réfugiés

Lorsque Mossoul puis Qaraqosh sont tombées aux mains des jihadistes de Daesh en août 2014, la mission de Soeur Amira auprès des pauvres s’est intensifiée. « Courir, courir, courir de villages en villages, sourit-elle. Comme Jésus, vous savez ! C’est la vie… » Dans les montagnes proches de Zakho, les familles de déplacés s’entassent dans des villages isolés que l’aide internationale peine à rejoindre. Selon la religieuse, 10 000 familles chrétiennes y habitent, sans compter les 4 000 familles yézidies qui vivent encore sous des tentes au beau milieu de l’hiver. La neige et le froid sont arrivés dans le nord du pays et les besoins grandissent. Les distributions d’aide extérieure sont trop souvent limitées aux sacs de riz et à quelques (rares) fruits et légumes.

©Fraternité en Irak

Les soeurs apprennent un chant de Noël aux enfants – ©Fraternité en Irak

Sœur Amira emmène les membres de Fraternité en Irak dans un village situé à une demi-heure de Zakho. “Il faudrait vraiment qu’il m’arrive un malheur pour que je m’arrête de courir”, s’exclame la religieuse. Ici, les réfugiés sont plus nombreux que les habitants. Entre les visites aux familles, sœur Amira se désole d’avoir si peu de moyens pour aider les déplacés à affronter l’hiver. Les deux camions de produits sanitaires et de jouets qu’a pu conduire Fraternité en Irak jusqu’à elle sont peu de choses face à l’ampleur des besoins. Mais grâce à son intermédiaire, l’association a pu faire une liste précise de ce qu’il faut acheminer le plus vite possible pour qu’une vie normale puisse reprendre peu à peu pour les réfugiés.

« Nous sommes loin de chez nous pour Noël, comme Lui. »

Malgré la détresse matérielle, pour les chrétiens, « l’espérance dans la foi demeure », souligne Sœur Amira. Mais alors que s’éloigne la perspective d’un retour dans la plaine de Ninive, la lassitude grandit. “Je crains que le ressentiment ne monte contre les habitants musulmans qui auraient pu rester dans les villes que nous avons du fuir, et qui cohabitent aujourd’hui avec Daesh, soupire-t-elle. Dans ces conditions, certains perdent confiance et souhaitent émigrer définitivement.”  Mais peu d’entre eux en ont les moyens, et beaucoup ne peuvent se résoudre à abandonner leur terre natale.

Un bénévole de Fraternité en Irak distribue des cartes postales dessinées par des enfants français – ©Fraternité en Irak

Cette année, la Nativité a une saveur particulière pour les familles réfugiées. C’est toujours une fête, mais dans certains villages, on n’a pas pu assister à la messe faute de prêtres. Néanmoins, la joie de Noël prend le dessus sur l’inquiétude. « Si peu se plaignent ! note Sœur Amira avec émotion, nous sommes pas dans nos maisons, mais finalement, cela nous rapproche de Jésus ! Lui aussi est né dans une crèche bien loin de chez lui… »

> Aidez-nous à poursuivre notre aide à Sœur Amira dans le nord de l’Irak !

 

 

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