Avec Sarah El Jamil, voyage auprès des plus pauvres et des oubliés

Avec Sarah El Jamil, voyage auprès des plus pauvres et des oubliés

PORTRAIT – Sarah El Jamil est une réfugiée originaire de Qaraqosh. Elle nous emmène visiter les réfugiés les plus pauvres relogés à Ainkawa après l’exode du 6 août 2014. Immersion dans le quotidien des déplacés oubliés. Rencontre(s).

Sarah accueille chaleureusement notre équipe de volontaires à l’entrée de Mart Schmouni à Erbil pour nous emmener avec elle visiter des familles. Élégante, toute vêtue de noir, elle part tout simplement discuter avec les familles et les personnes isolées. Elle n’emporte rien, mais ses rencontres lui permettent de connaitre les besoins tant spirituels que matériels des réfugiés qu’elle rencontre.

Les familles nécessiteuses, Sarah les connaît depuis longtemps. Elle avait fondé à Qaraqosh une association, « Les femmes aux aromates » (ou Myrrhophores) en référence aux femmes qui se pressent au tombeau du Christ portant avec elles les aromates de l’embaumement. Etre myrrhophore, c’est être porteur du parfum de Dieu, et cela qualifie bien Sarah dont la douceur et l’écoute paraissent embaumer les maisons qu’elle visite.

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Sarah, très pieuse, vit son engagement auprès des plus pauvres dans la foi et l’attachement à l’Evangile.

« Les femmes aux aromates » avaient donc pour habitude de visiter les familles pauvres de leur quartier à Qaraqosh. Leur approche est simple, elle surprend au premier abord et l’on se demande comment elles s’y sont prises pour entrer en contact avec ces familles. C’est pourtant le cœur de leur action parce que pour elles, connaitre les personnes compte autant que leur apporter de l’aide matérielle. Il faut pour cela visiter sans peur : sonner aux portes, sonner à nouveau, persévérer sans trop insister. Il peut y avoir des réticences ou des refus mais l’accueil est un des piliers de la culture irakienne et Sarah est toujours bien accueillie dans les maisons.

Après le 6 août 2014, une grande partie des réfugiés de Qaraqosh s’est retrouvée à Mart Schmouni. Sarah, elle-même réfugiée, a décidé de reprendre ses visites malgré le choc et la violence de l’exil qu’elle a connu. En revanche, la plupart des femmes qui l’accompagnaient ont  préféré ne pas poursuivre leur engagement. Tout perdre, quitter sa maison, sa ville, se retrouver dans un lieu étranger avec un futur incertain, autant de raisons qui expliquent aisément cette décision.

Dans le quartier de Mart Schmouni, pas besoin de faire des kilomètres pour rencontrer les  familles dans le besoin. À 20 mètres de notre lieu de rendez-vous se dresse un immeuble décrépi: premier étage, nous sonnons : une jeune femme nous ouvre. Elle partage son logement avec deux autres familles. Son mari a trouvé un travail dans un restaurant d’Erbil et elle garde leurs deux petits garçons de 3 et 4 ans. Ils sont apeurés en nous voyant alors que nous avons plutôt l’habitude d’être assaillis par les enfants. La jeune femme est démoralisée, toute pâle alors que le soleil est rouge cramoisi et que la température avoisine les 45°C. Les paroles douces de Sarah El Jamil gagnent sa confiance et elle devient plus loquace. Ne parlant pas arabe, nous nous sentons bien démunis mais Sarah nous affirme que l’on ne peut qu’être touché quand une personne s’intéresse à soi sans arrière-pensée, juste par fraternité. Cette famille est très seule ajoute-t-elle. Elle a particulièrement besoin de présence.

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Après cette rencontre, nous repartons vers l’immeuble situé presque en face. Là vivent, dans un taudis du rez-de-chaussée, trois personnes plutôt âgées : une femme, sa sœur et son mari. Le couple de 75 ans environ a vu partir plusieurs de ses enfants en Jordanie, aux USA. La plupart sont partis après la prise de la plaine de Ninive par Daech, un de leur fils est porté disparu depuis la guerre Irak-Koweït en 1990. Leur logement est sale, minuscule, avec une pièce à vivre et une cuisine. Il n’y a pas de salle de bain et l’évier leur sert un peu pour tout : des conditions vraiment difficiles. Lorsque nous les quittons, ils nous embrassent chaleureusement.

La dernière famille visitée ce jour-là habite près du camp de Mar Elia. La mère vit avec ses trois derniers enfants dont Anfal, 23 ans, qui souffre d’un handicap moteur. Son mari est décédé d’un arrêt cardiaque en 2009 à 53 ans. Ses autres enfants sont mariés, ils vivent non loin de là et lui rendent visite très souvent. Savoir ses enfants près d’elle la réconforte et lui apporte beaucoup de joie.

Sarah apporte son plein d’espérance à cette famille par sa douceur. Nous comprenons des échanges que cette famille vit dans une très grande pauvreté. L’état de santé d’Anfal ne lui permet pas de vivre dans une caravane ou une tente comme c’est le cas dans les camps. Le logement qui leur a été attribué est donc « plus adapté ». Sarah aide la mère à payer son loyer mais aussi à acheter le traitement d’Anfal. Il est en effet assez compliqué de se procurer des médicaments surtout lorsqu’il s’agit de traitements spécifiques.

Trois familles au milieu de tant d’autres, trois situations de détresse parmi des milliers. Sarah tient fidèlement son engagement ; elle va même plus loin en nous invitant à la suivre. Il y a beaucoup à faire mais les petits ruisseaux … font les grandes rivières !

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Fraternité en Irak soutient Sarah El Jamil dans son action très efficace auprès des plus démunis des réfugiés. Vous aussi, aidez les plus démunis en soutenant l’action des femmes aux aromates !

 

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