A Kirkouk, la force des liens entre réfugiés
RENCONTRES – A Kirkouk, 14 familles chrétiennes sont réfugiées dans l’école de l’église assyrienne Mar Georgis. Elles vivent là depuis l’exode, tant bien que mal. Les équipes de volontaires de Fraternité en Irak leur rendent visite régulièrement lors de leurs passages dans la ville. Portraits croisés de ces personnes qui ont tout perdu, mais qui tiennent malgré le temps et les épreuves, grâce à la solidarité des communautés qui les entourent.
Une volontaire de Fraternité en Irak avec Karam et son père Rayd. L’opération à la jambe de Karam s’est bien passée.
Un quotidien entre normalité et longueurs…
Loubna, qui vit au premier étage du bâtiment, a sa famille en Syrie – à Damas – et en Amérique. Lorsqu’elle a fui Mossoul, toutes ses économies en vue d’obtenir un visa et une nouvelle vie à l’étranger lui ont été prises par Daech. Plusieurs milliers de dollars volés et envolés. Elle travaille désormais à la banque et nous confie que cela lui permet de rendre de petits services à l’Eglise, comme changer des billets déchirés que personne n’accepte plus ! Elle est par ailleurs très touchée par l’action et la présence des Français « parce que vous prenez soin de nous, parce que vous ne nous oubliez pas ! » dit-t-elle aux volontaires.
Un vrai réseau de solidarité
Sa famille est arrivée ici, à Kirkouk, car au moment de l’exode, il n’y avait pas de place à Erbil… Ils ont donc continué la route. Grâce au travail de son mari, qui enseigne dans une école primaire, ils disposent d’un petit revenu leur permettant de faire vivre leurs trois enfants, Juliane, Hazra et Youssef. Le dernier a un problème de croissance qui complique certains actes quotidiens, mais le réseau de solidarité qui s’est créé entre les familles de cette petite école devenue refuge les aide à surmonter cette difficulté.
Entishar et sa famille, tout sourires !
Hadiba, arménienne catholique assez âgée, sans mari ni enfants, bénéficie elle aussi de la solidarité de ces familles réunies par une guerre qu’ils n’ont pas voulue. Les enfants du frère d’Hadiba sont en Turquie. A Kirkouk, pas de parents proches. Mais la force de la communauté lui permet de ne pas être esseulée. Pas évident pour elle de se déplacer jusqu’à l’église, ses jambes faibles et malades ne lui en donnant pas la force. Mais devant la pièce qui lui sert désormais de foyer, proche des autres familles, le voisinage lui rend visite et le quotidien est moins dur, la longue attente de meilleures nouvelles de sa terre d’origine plus facile à apprivoiser.
Un avenir entre espérance et incertitude
Autre porte, autre pièce remplie d’une grande famille : John et Maryline, avec leurs quatre garçons qui vont dans une école publique chrétienne, estiment eux aussi n’être trop malheureux en comparaison de certains. Mais cette année, c’est la troisième fois qu’ils auront célébré Noël loin de chez eux et ils aimeraient, enfin, retrouver leur foyer. C’est le vœu qu’ils formulent pour l’an prochain. A 160 kilomètres de là, la bataille de Mossoul est provisoirement en pause. La rive Est étant à cette date en passe d’être totalement reprise, les troupes attendent et se préparent à l’offensive vers Mossoul-Ouest. Les villages alentours, libérés, attendent eux aussi le retour de leurs habitants d’origine, déchirés entre l’envie de revenir et la crainte de voir la guerre resurgir dans les années qui viennent.
Loubna